DIAGONALE DES FOUS 2012 : Episode 9 « J’ai survécu » !
DIAGONALE DES FOUS 2012 : Episode 9 « J’ai survécu » !
Tout en discutant, nous grimpons avec Denis à travers les champs de canne à sucre. Direction la Possession où nous devons retrouver Françoise au ravitaillement.
La côte est longue, plus que je ne m’imaginais encore une fois, mais pas déplaisante. Une partie de la descente qui suit par contre devient à nouveau un petit enfer. Des blocs de rochers à sauter, hyper technique, et en plus avec ceux de la Mascareigne qui déboulent plus vite, je me range assez souvent pour les laisser passer. Pas envie d’y laisser une cheville, je descends tranquillement, en attendant que cela passe. Nous finissons par rejoindre la route qui domine La Possession. Au premier virage à tête d’épingle, je suis interpellé par mon Prénom. Je n’y fais pas trop gaffe car celui-ci étant inscrit sur le dossard, de nombreuses fois j’ai eu droit à des encouragements « Allez Claude ! ». La même personne insiste, je la regarde, et découvre mon voisin de table du gîte d’Ilet à Bourse.
Stop ! Pas longtemps, le temps de se saluer tout de même, lui et sa petite famille, et d’échanger sur la course. Il me suivait sur Internet et espérais bien me voir ! Agréable et sympathique rencontre. Petit ravitaillement juste après, je le squatte pour rejoindre Denis à la sortie et continuer. Après cette descente pour « équilibriste », j’ai la plante des pieds de plus en plus sensible. Je peux poser encore le pied par terre sans trop de problème, mais une gêne de plus en plus forte devient continue. A 1 km de l’arrivée au ravitaillement de La Possession, nouvelle surprise, la rencontre d’un ami Crestois venu lui aussi pour m’encourager, accompagné de son petit fils Kilian (le futur ?) qui a suivi assidûment mon parcours sur Internet. Nous nous étions vus par le plus grand des hasards 2 jours avant la course sur la plage de Saint-Leu. Ils nous accompagnent jusqu’à l’entrée du ravitaillement, réservé aux coureurs. Le temps de me faire pointer, je ressors et nous nous retrouvons près de l’église où Françoise s’est installée. Le casse-croûte m’attend, j’en profite pour me mettre à l’aise.
J’enlève chaussures et chaussettes pour faire enfin respirer un peu mes orteils et surtout soulager ma plante de pieds de plus en plus sensible. La peau des pieds est toute blanche, fripée comme jamais j’ai vu. Je grignote différentes choses tout en bavardant avec l’équipe, mais je n’arrive pas à manger beaucoup. Dans le pré, un coureur de la Mascareigne s’est installé près de nous, entouré de la famille qui le dorlote, le masse, le réconforte. Mes pieds commencent à revivre un peu. Je me laisse un peu aller, la fatigue aidant. Personne ne me boostant à repartir, il faut que je me décide ! Rendez-vous est pris avec Michel quand ils seront de retour sur Crest pour revivre nos périples mutuels. Je repars doucement avec Denis, le temps que mes pieds se réhabituent à marcher puis à courir. Nous laissons Françoise, prochain rendez-vous à La Chaloupe ! J’arrive à reprendre la course assez rapidement en bordure de route, qui nous amène au début du fameux sentier des Anglais. Un chemin large mais qui grimpe ou descend assez fortement dans son ensemble, et parsemés de grosses pierres plates en guise de dalles.
Celles-ci au fil du temps ont pris des positions pas toujours bien sympas sur les parties les plus pentues. Je m’imagine en plein cagnard ce que cela peut donner. Heureusement pour nous, le ciel est bien couvert, ce qui nous évite une grosse difficulté supplémentaire : la chaleur et le fort risque de déshydratation. Toujours bon rythme en montée, enfin tel qu’il peut être avec 140 km dans les jambes. Les parties descendantes ne me conviennent pas vraiment à nouveau. Heureusement les pierres adhèrent parfaitement, les pieds ne glissent jamais sur cette roche volcanique. Denis s’arrête sur les hauteurs pour un petit besoin pressant, et quand il me rattrapera, il ne me verra pas, étant à ce moment là, dans la foulée de 2 autres coureurs. Si bien que me croyant devant il va très vite me distancer. Et moi croyant qu’il cherche juste à se défouler un peu, je me dis que je vais le revoir sans tarder.
Ce sera finalement peu avant La Chaloupe que nous nous retrouverons. Arrivé au contrôle, pointage, petit grignotage à nouveau. Ne voyant pas Françoise, je pense qu’elle nous attend à la sortie du contrôle. Nous repartons tranquillement, guettant à droite, à gauche. Rien ! Arrivé au pied de la bosse, je l’appelle. Elle est au contrôle à nous attendre ! He ben pour La Chaloupe, ch’est loupé !!! Nous reprenons avec Denis l’ascension nous menant vers St-Bernard, puis ensuite le Colorado, avant de terminer par une grande descente sur St-Denis.
Dans mon esprit c’est assez court. Une fois de plus ça va être beaucoup plus long que je pensais. Mais comme tout va bien, je me défoule un peu. Bonne allure en côte, où nous retrouvons notre voisin de pré de La Possession qui s’arrête assez régulièrement pour se reposer un peu. Les chemins sont assez variés à présent : route, chemin large, mono sente, assez roulant dans l’ensemble. Dans une portion descendante sur route, je lâche les freins, … le plaisir de la vitesse sans douleurs ! Je me régale. Dans les côtes je trottine quand le pourcentage le permet. Mais sur une tentative d’accélérer un peu, je n’insiste pas, mes muscles me font savoir qu’ils n’apprécient pas vraiment. Soyons raisonnable ! Je n’aurai pas parié grand-chose sur un aussi bon état physique à ce stade là de la course. En réalité, je ne me voyais plus courir depuis longtemps.
Rencontre amusante dans une côte avant St-Bernard avec un groupe de joyeux lurons qui animent la course. La montée du Colorado porte bien son nom. Le terrain de couleur ocre, est raviné à souhait.
Quand nous arrivons au sommet, petit contrôle surprise à nouveau, où nous sommes invités à sortir nos lampes frontales avec vérification qu’elles fonctionnent. Il fait encore jour, cela m’étonne. J’apprends que pour la descente finale nous en avons pour 1h30 à 2h car très technique et en sous-bois une grande partie, d’où peu de luminosité à présent ! J’en reste un peu sur le cul ! Je pensais à ½ h ! Denis avait prévu de rejoindre Françoise au « 3ème virage ». Vu les circonstances, il appelle Françoise pour lui dire que finalement il ne descend pas avec moi. Lui qui n’est pas très bon non plus en descente, il a fait le bon choix, car je découvre rapidement un ‘enfer’ ! Des racines qui couvrent tout le sol, à se tordre les chevilles à chaque pas. Ce qui ne tardera pas d’ailleurs, non pour moi, mais pour une concurrente, à qui je vais remonter le moral, celui-ci étant tombé subitement dans les chaussettes. J’arriverai à la faire rire un peu de ses malheurs et lui redonner le coup de fouet nécessaire pour terminer sa course. Je repars devant mais au ralenti moi aussi car je n’ai vraiment pas envie qu’il m’arrive quoique ce soit. Seulement voilà je ne suis pas au bout de mes peines, après les racines, ce sont les cailloux, les rochers qu’il faut dégringoler. Et ça n’en finit pas. Je suis un peu en colère dans mon fort intérieur contre l’organisation. Quel intérêt un chemin pareil (mais peut-être n’y en a-t-il pas d’autre ???) pour arriver sur le stade de la Redoute à Saint-Denis ? Je plains franchement ceux qui vont arriver après moi, épuisés de fatigue et de courbatures, pour passer toutes ces difficultés. Pour ma part, je n’apprécie pas du tout cette portion, que je descends tranquillement mais un peu énervé. D’autant plus que cela n’a fait qu’accélérer mes sensations désagréables sous la plante des pieds. A présent, j’ai l’impression de marcher sur des aiguilles. 2 allers-retours sur le chemin à un moment où je me pensais perdu, tellement le chemin était peu évident avec des amas de petits rochers. Du coup, je profite d’un groupe de 3 réunionnais participant au trail de Bourbon qui me confirment que je suis bien sur le bon chemin pour leur emboîter le pas et rester dans leur sillage.
Nous dominons assez rapidement Saint-Denis tout éclairé car la nuit est quasiment tombée. Les 2 derniers kms se font sur un sentier plus roulant, puis du goudron. Je reste toujours dans leur sillage malgré que ça me démange d’accélérer. Quel intérêt à se faire mal sur le dernier km ? Aucun je me dis, du coup je reste sagement derrière. Les spectateurs sont nombreux à nous applaudir, et encore plus une fois dans le stade. Un 1/3 de tour de piste pour arriver sous la banderole ! J’aperçois Jacky qui est déjà arrivé (il est classé 98ème, un grand chapeau pour ce 1er grand ultra !). Je filme l’arrivée avec mon appareil photo, ce sera raté avec la nuit qui assombrit tout. Françoise est là au bord de la piste juste avant la banderole. La ligne franchie, des bénévoles contrôlent mon dossard, me décerne la médaille souvenir et le fameux tee-shirt « J’ai survécu », tout en me demandant si cela s’était bien passé.
Ca y est !!! Le rêve est terminé, heureux en moi-même comme jamais à l’arrivée d’une course. Je m’attendais tellement à arriver épuisé que j’ai du mal à réaliser que c’est la Diagonale des fous que je viens de réussir vu mon état de forme. Pas de courbatures, de la fatigue, mais pas d’épuisement, juste la plante des pieds sensibles.
Il y a 4 ans ce n’était même pas un rêve pour moi, c’était tout simplement inaccessible quand j’avais lu l’article que m’avais fourni mon amie Jeanine. Comment peut-on courir sur une aussi grande distance ? Moi qui arrivais difficilement à tenir 25 km de marche dans la journée sans être courbaturé de partout, c’était impensable. Il y a 2 ans, c’était devenu un rêve. Aujourd’hui c’est devenu une réalité !
Mon plaisir est intérieur, mais immense. Et encore décuplé quand je pense à tous ceux qui m’ont suivi en live sur internet d’avoir pu rallier l’arrivée et partager du coup avec eux à distance ce plaisir. Fabuleux, me dis-je… Et ce qui m’ouvre de nouveaux horizons à présent !
A suivre «La découverte de l’île… »
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