100 Km de Crest 05/2010 : Mirabel - Crest 2ème partie
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Contrairement à l'an passé où j'avais terminé de Mirabel à Saillans en marchant quasiment tout le long, y compris dans les descentes, cette année je tiens sans problème la course sauf dans les parties montantes à partir de 5% environ. Nous attaquons à présent le serre de Pipit, tout en longeant la vallée en contrebas d'où monte le bruit de la circulation, nous rappelant subitement tout le plaisir que l'on a à courir sur ces sentiers au calme. J'enchaîne les côtes avec une relative facilité, ce qui m'étonne de plus en plus. J'ai en tête à présent la nouvelle côte qu'ils ont rajoutée juste avant Saillans. Vu ma forme, je la savoure à l'avance. Alors que je croyais qu'elle commençait au moment où l'on attaquait la descente sur Saillans, à ma grande surprise, le changement de direction se fait alors que nous sommes à peine à 2 km de Saillans. Peu après un participant me rattrape.
J'en profite pour faire une photo ! Nous continuons ensemble, mais nous voilà au bord d'une falaise ! Pas de balisage, nous avons dû nous planter. Je vois en contrebas sur une grande piste une personne qui court. J'en déduis que le circuit doit passer là-bas en bas. Demi-tour jusqu'à retrouver le balisage, le voilà juste à l'endroit où j'ai pris la photo ! Celle-ci nous a perturbés au point de ne pas voir le changement de direction, pourtant bien signalé par 4 flèches au sol. S'ensuit une descente technique où mon compagnon d'infortune file devant à allure grand V. Bien incapable de le suivre. Traversée de ruisseau, je rejoins le grand chemin, et très rapidement nous prenons un nouveau sentier sur la colline.
Peu à peu nous voyons Saillans s'éloigner, devenir de plus en plus petit. Le sentier se transforme en une sente taillée droite vers le sommet à travers la végétation. Je me mets soudain à maudire les organisateurs. Impossible à marcher même, il faut s'agripper aux arbres pour arriver à mettre un pied devant l'autre, en essayant de le caler pour ne pas redescendre aussi sec. J'aperçois devant moi une féminine qui n'en peut plus. Je la rattrape et l'encourage, mais comme tous, elle n'apprécie pas du tout ce passage, meurtrier pour les jambes, et surtout pour ceux qui n'en peuvent quasiment plus. Pour ma part, j'avance difficilement, mais sans problèmes particuliers, si ce n'est que j'ai peur que cela me tue pour la suite. Obligé de forcer dans ce passage, sinon on ne peut pas avancer. Arrivé en haut de cette partie « assassine », je prends une photo, mais sous le coup de l'effort, j'ai la tête qui commence à me tourner légèrement. Du coup je repars de suite mais tout doucement, le temps que cette sensation disparaisse. La montée continue encore un peu, mais plus facile heureusement. Nous voici enfin au plus haut ! On a bien dû reprendre au moins 400m de dénivelé ! J'attaque la descente. Passage un peu technique au début, mais très vite, un beau sentier roulant nous attend. Je me fais enfin plaisir en descente. Sylvain me doublera au milieu, mais sans me prendre beaucoup d'avance pour une fois. Un autre participant me suit, mais reste derrière, mon allure lui convient très bien car il a pris un point de contracture dans le dos. L'effort de la dernière montée ne se fait pas ressentir pour l'instant, je cours toujours sans aucune douleur, si ce n'est une légère fatigue générale. En chemin nous croisons un « cinéaste » qui nous filme. Celui qui me suit m'informe que c'est l'organisateur du trail du Ventoux ! Je n'en doute pas car à le voir descendre en coupant les lacets, grosse caméra au poing, ce n'est pas un néophyte ! En arrivant dans Saillans, j'aperçois Françoise qui m'attend. Et Jean-Luc arrive en même temps de la montée du col du Rousset à Die qu'il vient de faire. Céline y était aussi, avec Benoît, Jeanne, Marianne, Kévin. Petite discussion, puis je finis jusqu'à l'arche d'arrivée (pour le 65) où le ravitaillement m'attend. Je retrouve à nouveau Phil et Robert. Au GPS d'autres participants, nous en sommes déjà à 68 km et 3850m de dénivelé positif.
Je prends le temps de bien me restaurer tout en discutant avec chacun. Je leur fais part de ma surprise de me trouver ici en aussi bonne forme. Dans l'état où j'étais l'an passé, je crois que je n'aurais pas réussi à franchir cette dernière bosse au vu de sa difficulté. Il faut à présent passer par le stand contrôle médical. Prise du pouls (78), de la tension (11-8), bon pour le service ! Je n'en doutais pas. Un peu d'échauffement aux pieds, mais léger, en tout cas pas d'ampoules douloureuses ce qui est sûr. De ma sacoche apportée par l'organisation, je ne prendrai que quelques barres de céréales et ma boisson maison. La pluie s'invite au moment où je repars. A priori, Céline m'attendra au contrôle de Saoû pour m'accompagner sur les 18 derniers km. Je croise dans les rues de Saillans Pascal Moreau, l'organisateur (et très bon coureur à pied) du trail des balcons de la Drôme. Nous rejoignons rapidement la dernière nouveauté de ce 100, le rocher de Cresta.
Sentier agréable, pas de souci à la montée, mais une première descente très technique. Sur une partie plus roulante, je rattrape 3 autres participants et leur accompagnateur. Ils me laissent passer sitôt que le terrain le permet, le secteur étant très accidenté. S'ensuit une descente large cette fois, sans vraiment d'obstacles, si ce n'est la pente. Mes genoux commencent à grimacer, obligé de freiner un maximum pour ne pas m'emballer. J'arrive au bord d'un ruisseau avec soulagement, petit pont aménagé pour traverser. Je retrouve la route juste après, et j'aperçois pas loin Sylvain et son ami. J'attends un peu pour faire la route avec eux. Nous gardons quelques hectomètres la route de Chastel Arnaud. Puis c'est un chemin large, relativement aplani, qui va nous mener au village des Auberts par une grimpée assez régulière.
Le rocher de la laveuse se dresse sur notre tête, tout là-haut. Nous venons d'attaquer le gros morceau de la journée : les 3 becs. Nous grimpons tous les 3 ensemble, tout en discutant. Arrivé au village des Auberts, nous redescendons par la route un tout petit peu, avant de reprendre cette fois un petit sentier direction le pas de la Motte. Je laisse mes 2 compagnons pour partir devant, ayant envie de reprendre un bon rythme en grimpée, me sentant toujours à l'aise. Je rattrape un autre participant un peu plus loin, c'est Ludovic qui a créé lui aussi un blog « Ludo le fou ». Encore un qui me fait rêver avec ses grands ultras ! Les choses sérieuses se présentant à nous, je passe la vitesse supérieure, et ne verrai ni n'entendrai plus personne assez rapidement. Personne devant, ni derrière, c'est le désert. Au point qu'au bout d'un moment, je ne vois plus de balisage propre à la course. Nous suivons le GR. J'ai beau me dire qu'il n'y a pas de risque de se tromper ici, j'ai des doutes. N'ayant pas étudié cette partie du circuit, je me demande si le parcours passe vraiment par le pas de la Motte. De toute façon, avec tout ce que je viens de grimper, pas question de redescendre. Si je me suis gouré, j'essayerai de rejoindre le circuit par les crêtes. Je continue la grimpée qui est de plus en plus raide. Les 2 dernières fois que je l'ai fait, je l'ai fini dans la neige. Aujourd'hui ce ne sera pas le cas, mais des plaques de neige seront encore apparentes sur les 3 becs un peu plus loin.
J'arrive au pas, et gros soulagement, un bénévole est là, confortablement installé (si je peux dire !) dans un duvet sur un hamac, une toile tendue par derrière lui pour lui couper le vent. A tel point qu'il s'était endormi et n'avait pas vu arriver le premier. Pas très chaud le coin en effet, je ne traîne pas trop. J'enchaîne à présent avec les crêtes qu'il nous faut remonter, en bordure de corniche. Le brouillard se cale sur les contreforts de la corniche. Entre deux vagues, on aperçoit tout petit en bas Saillans en fond de vallée. Le paysage ici est toujours aussi magnifique, je n'arrête pas de faire des photos.
Mais j'ai les doigts gelés et par trois fois l'appareil me glisse des doigts. Heureusement que je l'avais pris antichoc ! J'ai bien une paire de gants dans mon sac, mais la flemme de les sortir. Ce chemin est superbe, mais pas facile. Et toujours autant de facilité dans les montées, aucune douleur dans les jambes, juste une petite fatigue. Moi qui pensais que j'allais arriver ici sur les rotules, je me sens des ailes dans les côtes. J'aperçois soudain une tente rouge devant moi. C'est le contrôle électronique et donc la fin de l'ascension sur le rocher de la laveuse. Le bénévole sort de sa tente pour me pointer avec sa galette.
Et à peine reparti, il y retourne vite pour se remettre à l'abri. Je lui souhaite bon courage pour terminer sa mission. A présent, je sais que je vais moins rigoler : il me reste presque plus que de la descente. Cette première partie n'est pas trop mal, mais je ne vais pas vite. Je ressens de la fatigue musculaire, surtout sur les genoux. J'y vais mollo, cherchant à éviter la chute. Je me tords une nouvelle fois la cheville, la droite cette fois, mais toujours sans conséquence. Je rejoins le grand chemin qui fait le tour de la forêt de Saoû, et le remonte légèrement pour rejoindre l'embranchement de la combe. Nouveau bénévole qui pointe les passages, à l'abri dans sa voiture avec le chauffage pour ne pas se geler. Mes mains se sont réchauffées, j'en retrouve un usage normal. Nous sommes à l'abri du vent froid des sommets. La partie la plus dure est devant moi, je le sais pour l'avoir déjà pratiquée. La petite pluie qui m'accompagne à nouveau va me rendre la tâche encore plus ardue. C'est pratiquement en marchant que je vais la faire, par sécurité, et pour soulager mes genoux. Néanmoins, je me retrouverais par deux fois sur le derrière en glissant sur des petits rochers. Beaucoup de cailloux, de branches, parfois des troncs en travers du chemin, et dans un décor très spécial, encaissé, verdoyant, humide. Cette descente n'en finit pas. Au moment où j'arrive sur le passage le plus pittoresque, ma carte mémoire est pleine : plus de photos ! Tant pis, en bas Françoise pourra me fournir une autre carte. Le chemin enfin redevient roulant, le ravitaillement de Saoû n'est plus très loin du coup. Je reprends mon allure de croisière en courant, tout va bien, les muscles répondent toujours. L'ami de Sylvain me rattrape sur le dernier km, et ce dernier n'est pas très loin derrière. J'aperçois Céline en tenue de course, la météo ne l'a pas découragé.
Je retrouve Françoise au ravitaillement. Sylvain arrive juste derrière moi, il accuse un peu le coup. Je m'arrête à peine 10', le temps de me ravitailler en liquide et consistant pour finir les 18 km restants. Changement de carte sur mon appareil photo, Céline le prend et se chargera des photos à présent. Nous repartons, et d'emblée une côte pour se remettre dans le bain. Les jambes sont toujours là, les côtes me soulagent presque les genoux.
Nous passons au milieu d'asphodèles, je ne me rappelais pas en avoir déjà vu ici. Après les orchis pyramidales de la matinée, les aphyllantes de Montpellier entre autres, nous aurons eu un beau spectacle floral sous nos yeux. Nous rejoignons assez rapidement le grand chemin que nous prenons dans le sens de la descente. Mes genoux se réveillent à nouveau, j'essaye de les économiser au maximum. Un autre participant que je n'avais pas remarqué jusqu'alors n'est pas très loin derrière. Me sachant en général un peu plus fort en côte, j'ai envie finalement de jouer la place. Pour le plaisir de l'effort. Du coup j'accélère légèrement, et il restera juste derrière moi jusqu'à ce que nous rejoignions la petite sente qui va nous amener au pas de Faucon un peu plus haut pour franchir la barrière naturelle de rochers bordant la forêt de Saoû. Le chemin commence par serpenter dans les prés, un vrai régal. Puis assez vite nous voilà dans le vif du sujet : ça grimpe et dur ! Je me retrouve presque avec des jambes neuves, je monte vite, si bien que Céline a du mal à me suivre à présent. L'autre participant n'est plus visible. Je garde l'allure ainsi presque jusqu'en haut, ralentissant un peu toutefois car la fatigue commence à se faire sentir. Le pas du Faucon franchit, la descente qui s'annonce ne me réjouit pas.
Un bon pourcentage, glissant, je m'aide un peu de mes bâtons pour me freiner. Tant bien que mal, je passe ce mauvais passage (pour moi) en ménageant tant que je peux mes genoux. La pente se radoucit, nous retrouvons même le bitume un peu plus loin. Je reprends la course, les jambes répondent toujours. Nous arrivons au dernier point d'eau, près du centre équestre. Il y a de quoi manger, du coup j'en profite. La nuit arrive, nous mettons nos frontales en route. Au moment de repartir, l'autre participant qui me talonnait arrive à son tour. Du coup ça me remet un peu de pression. Heureusement pour moi, la rentrée sur Crest se fait par des sentiers qui montent et descendent, et non par la route d'Aouste. Du coup, dans les côtes je remets le paquet, mais je commence à accuser le coup cette fois. La fatigue arrive, mais qu'importe, je sais que j'irai au bout à présent, sauf accident.
La vue de nuit sur Crest est belle avec ces lumières éparpillées, dominées par la tour majestueuse. La dernière descente est un peu douloureuse pour les genoux, mais je cours toujours sans autre problème. Pas de lumière derrière en vue, j'aurai réussi à garder ma place. Petit plaisir qui vient s'ajouter à celui IMMENSE de finir mon premier 100 km avec un tel dénivelé (5800 m D+) en moins de 2 ans de pratique de course à pied, et dans un état de fraîcheur bien meilleur que la plupart des grandes distances (40 km et +) que j'ai couru jusqu'à présent.
Je n'en crois pas mes yeux, et ne sais vraiment comment l'expliquer si ce n'est par le fait de m'être alimenté pour une fois correctement du début à la fin. En tout cas, c'est avec une joie intérieure que j'arrive sous les applaudissements sur la ligne d'arrivée. Je suis sur un petit nuage, du mal à réaliser ce que je viens de faire avec autant de facilité. Quelques minutes après, mon poursuivant vient me serrer la main. Il me dit avoir cherché à me rattraper, mais ne voyant plus de lumière devant lui sur la fin, il avait fini par capituler. Je lui avoue que sans la dernière côte, il m'aurait certainement doublé, car j'étais incapable en descente de le suivre, les muscles (ou tendons ?) juste sur les genoux commençant à sérieusement tirer. Et en tant que finisher, nous avons droit à une mini polaire sans manches avec gravage « TOP 20 » ! 18h19' de bonheur, un beau souvenir qui vient s'ajouter aux autres, mais surtout qui m'ouvre la porte vers de nouveaux ultras qui me font rêver…
Merci à mes supporters, Françoise qui a quasiment fait une nuit blanche, Céline pour m'avoir accompagné et pris les photos, Jean-Luc, Phil, Robert, Gérard. Ces présences sont toujours réconfortantes et remotivent quand c'est nécessaire. Bilan physique sur la balance : 3.6 kg de perdu ! 1 semaine après, il manque toujours un kg sur la balance…
Un grand MERCI aux organisateurs qui nous font vivre ainsi des moments extraordinaires ; les vrais « marathoniens » du week-end ce sont eux, car je n'ose imaginer durant ces derniers jours le nombre d'heures qu'ils ont dû dormir. Les nuits ont été certainement très très courtes. BRAVO à vous !
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