Coco le cyclo...

Coco le cyclo...

Le grand raid des Cathares : A l'attaque ! (2ème partie)

     Le grand raid des Cathares : A l'attaque ! (2ème partie)

 

En retraversant la ville d’Arques, je croise un coureur qui fait demi-tour ayant loupé la bifurcation. Ca me fait sourire, je ne suis pas le seul à me planter. Le changement de pile a été le bienvenu. Mon éclairage est nettement meilleur, sans être toutefois mirobolant. Il est toutefois suffisant pour les montées, seules les parties techniques en descente me retiennent un peu car j’ai du mal à évaluer vraiment les obstacles. Le temps est toujours au beau, pas vraiment froid pour l’instant. De plus nous attaquons par une bonne grimpée qui me va bien. Les jambes sont au beau fixe, pas de douleurs, juste la fatigue qui s’installe au fil des km. Je me force à bien penser de boire régulièrement, mais j’ai rarement soif. De plus la nuit avec la fraîcheur, nous avons toujours tendance à peu boire. Déjà 50 km et je n’ai pas encore bu une poche pleine de 1.5 L. Il faut dire que je bois aussi systématiquement un petit verre de 15 à 20 cl à chaque ravitaillement. Un autre coureur avait qui je discutais dans la journée me disait qu’il avait déjà bu 2 L au 2ème ravitaillement, soit au bout de 21 km. Comme quoi nous sommes tous différents, chacun vit sa course à sa manière, l’essentiel est d’apprendre à bien se connaître et de se gérer. La nuit a la particularité de perdre tous ses repères visuels par manque de clarté. J’aurais bien du mal à vous décrire à présent les sentiers. Au fil des rencontres par contre, nous échangeons chaque fois que l’occasion se présente. Et c’est ainsi que je vais faire un petit tour de France. L’Alsace pour commencer avec Lukasz, puis (dans le désordre), Poitiers, Nantes, Toulouse, Marseille, la région Parisienne… Echanges sur nos pratiques, les ultras déjà effectués, nos souvenirs marquants… Je découvre ainsi des courses que je n’ai pas encore eu l’occasion de faire : les 100 miles des Pyrénées, l’UT4M, l’infernal des Vosges. Un participant m’a plus marqué que les autres : celui de Nantes. Il n’a rien trouvé de mieux que de faire le tour de France en courant cet été, 2700 km si j’ai bonne mémoire à raison de 70 km par jour. Il est plus coureur sur route, mais les ultra trails il aime bien aussi, la preuve. Certains ont participé aussi à la diagonale des fous, et pour tous ce fut leur plus belle course. Moi qui avais peur de passer toute la nuit seul, j’aurai finalement passé ¼ de mon temps en compagnie d’autres coureurs. La nuit passe ainsi plus vite. Je me fais plaisir dans la descente qui nous amène sur Rouffiac, les jambes ayant du répondant, sans aller vite non plus, mais je glisse tranquillement. Je n’ai pas trouvé encore de bonnes sensations en descente depuis le départ pour m’éclater vraiment, ce qui a aussi pour effet bénéfique de ne pas me cisailler les cuisses pour la suite. Un autre coureur a par contre de grosses difficultés à continuer, ses cuisses ont explosé. Je ne peux que lui souhaiter bonne courage pour la suite, peut-être qu’avec un bon repos il pourra repartir. Je traverse le village bien éclairé, mais aucune âme qui vive ! Je croyais que nous avions un ravitaillement, ce sera pour plus tard ! A présent l’ascension jusqu’au château de Peyrepertuse. De vagues souvenirs, sachant  que nous étions déjà venus le visiter mais en voiture. Je ne sais pas ce qui m’attend… et ce n’est pas triste ! Si j’avais su… Oh rien de bien terrible, mais une grimpée très raide où les mains servent souvent. Moi qui dans ma tête je m’étais mis que ce serait roulant tout le long, j’ai tout faux ! D’habitude ce genre de grimpée, j’aime. Physiquement pas de soucis, je décroche 2 coureurs qui m’avaient presque rejoins sur la fin de la descente. Mais mentalement cela me chiffonne de ne pas avoir anticipé ce genre de côte. Je rencontre une jeune supportrice qui descend à la rencontre d’un coureur. Et qui m’encourage : « Allez encore une montée raide et c’est presque le ravitaillement ! ». Ayant déjà monté bien raide et depuis un moment, je me dis que j’ai dû en faire une grosse partie. En réalité je n’en ai fait que la moitié ! Le ravitaillement me tarde dans ma tête, plus pour une question d’horaire que de besoins car j’ai tout ce qu’il faut sur moi et je n’ai besoin de rien. Je finis par apercevoir l’enceinte du château juste en dessus de moi. Nous faisons le tour de la montagne pour rejoindre enfin le contrôle. Applaudissement des bénévoles à nouveau qui nous encouragent tant qu’ils peuvent. Je pointe en 30ème position, je ne suis pas mécontent. Ca va être dur à présent de remonter des places car nous sommes tous du même niveau, cela va se jouer à l’endurance et le niveau de fatigue. Je me sens encore de bonnes ressources pour la suite. Je prends le temps de manger un peu mais sans plus, et je repars après 5’ d’arrêt. Toujours à mon rythme de sénateur, je rejoins Cubières et son ravitaillement. Pointé 25ème ! Où sont-ils passés les 5 que j’ai doublé ?? 11’ d’arrêt pour bien me requinquer avant le gros morceau de la course, le pic de Bugarach. Je repars 23ème. Au programme les gorges de Galamus, je n’en verrai rien. Je me demande même si nous avions quelque chose à voir ! La nuit est toujours là, je me dis que je devrais arriver peu après le lever du jour au sommet, ce qui m’enchante pour la vue et peut-être voir le lever du soleil d’en haut. 21 km pour rejoindre Sougraigne. D’ici 2h je devrais avoir atteint le point culminant de la course à un peu plus de 1200m. Une formalité dans mon esprit ! Mal m’en a pris de ne m’être pas plus documenté sur cette ascension. Perdu dans mes rêveries, sans repère physique dans la nuit, je grimpe, je grimpe, des parties un peu roulantes de temps en temps pour relancer l’allure. Une faible lueur apparaît à l’horizon, le jour est le bienvenu. Nous allons enfin voir du paysage. Un sommet sur ma droite à200, 300m de D+, je me dis que le pic est déjà là. Un peu comme j’avais prévu. Mais voilà, cela ne se passe pas du tout comme ça. Le terrain devient plat puis légèrement en descente et ça dure. Je déroule tranquillement pensant avoir fait le plus dur. Soudain, fléchage à droite, droit dans la pente. A ce moment là arrive 2 randonneurs qui m’interpellent. Ce sont 2 bénévoles qui montent au pic pour mieux baliser car les premiers se sont un peu perdus. Moi qui croyais avoir déjà fait le pic ! La montée devient raide, très raide, je prends les devants allant un peu plus vite qu’eux. Une montée comme j’aime bien en temps normal, mais je suis perturbé dans ma tête. Le brouillard pointe son nez, on ne va rien voir zut. Pas très dense, mais suffisamment pour ne pas voir où l’on va. Le balisage, très bon jusque là, devient vraiment insuffisant. Je cherche les balises. A priori nous sommes sur un chemin de randonnée balisé d’un trait jaune. Pas facile de voir non plus ce balisage, un peu ancien. Et plus nous grimpons, plus le chemin devient aléatoire dans les rochers. Après une bonne partie boisée, nous voici dans la rocaille et toujours le brouillard. Un trou dans un pan de rocher que l’on appelle « la fenêtre » (je le saurai après !) me fait penser enfin à prendre une photo. Mon esprit est perturbé, le brouillard aidant, je n’ai plus la tête aux photos. L’ascension devient aérienne, de la mini escalade par moment. Chaque fois que je pense voir le sommet devant moi, quelques mètres et un nouveau sommet se dessine à travers le brouillard. Et ainsi de suite ! Ca me sape le moral. Les jambes ont toujours du répondant mais je suis énervé. Un poteau sur la crête, enfin j’y suis ! Ben non, il y a encore d’autres crêtes plus haut… Toujours à la recherche de balises, elles se font rares. En voici une légèrement en contrebas du chemin que je suis. Je continue donc le chemin, pas de balises mais des points jaunes. N’ayant pas vu d’autres sentiers, je continue. Au bout d’un moment je m’interroge. A ce moment là un autre coureur arrive, perplexe lui aussi. Nous décidons de continuer un peu le chemin. Celui-ci prend la descente et de manière vertigineuse sur un petit morceau de crête, puis plus loin une corde qui descend quasiment à pic le long de la paroi. Pas très longue, mais impressionnant. Un peu plus loin toujours pas de balises. Je lui demande s’il a une boussole, il en a en effet une sur sa montre. Et elle indique plein sud ! Stop ! Je lui dis que devrions de mémoire être plutôt Nord-Ouest, quasiment à l’opposé. Nous décidons de faire ½ tour et de retourner jusqu’à la dernière balise vue. Sympa, il m’attend. Avec ses grandes jambes il avale les obstacles plus vite que moi. Grimpée de corde, de l’arête… Nous y revoilà ! Nous cherchons et finissons par trouver des flèches au sol un peu plus loin… qui nous amène encore à grimper derrière une arête rocheuse. A ce moment là, nous entendons une corme de brume, celle d’un des 2 bénévoles qui avait grimpé juste derrière moi, et qui souffle régulièrement dedans pour nous guider dans le brouillard. Pendant que son collègue essaye de rajouter des balises pour mieux nous orienter. Quand nous arrivons à leur hauteur, mon collègue n’est pas content du tout et le leur fait savoir. Il est vrai que je suis en rogne moi aussi, mais plus contre moi que contre eux. Je leur tire même mon chapeau pour avoir essayé de rétablir la situation, car ils ont dû en entendre les pauvres ! J’apprendrai plus tard que 3 coureurs qui étaient devant avaient fait la même erreur que nous, mais en insistant beaucoup plus, si bien qu’une fois qu’ils ont compris qu’ils s’étaient plantés pour de bon, ils avaient abandonné. ½ heure de perdue en ce qui me concerne, ce n’est pas la mère à boire. Mais mes nerfs sont tendus du coup. 2 belles montées que je n’ai pas appréciées car complètement sous-estimées, le fait de se perdre, bref si le moral est toujours là pour continuer, il en a pris un coup. Et je n’ai pas su réagir à ce moment là. Au lieu de prendre le temps de me ressaisir, je pars bille en tête dans la descente, les nerfs à fleur de peau. Le terrain un peu humide avec le brouillard, bien que pas trop technique, je n’ai aucune souplesse en descente et je me raidis au fil des km. Et très vite, je n’arrive plus à courir quasiment. Ca finit de me mettre les nerfs en boule. Je finis par en prendre mon parti et j’occulte à présent le chrono. Je rejoins une route ou des supporters attendent leur coureur. Le soleil nous réchauffe à présent et j’apprécie. Le balisage a retrouvé son efficacité à présent. Soudain je trouve des flèches au sol en sens inverse ! Je trouve des balises régulièrement, mais à force de voir des flèches en sens inverse je me demande si je ne suis pas à l’envers ! Le doute s’installe, et échaudé par les erreurs précédentes, je préfère téléphoner au PC course dont le n° figure sur le dossard. La personne me rassure et me demande de continuer dans le même sens. Peu après un coureur me rattrape et me double. Cela me rassure quelque part. Nous arrivons bientôt dans le village de Bucarach. J’apprendrai après coup que c’était le fameux village qui devait seul réchapper à la fin du monde en fin 2012. Françoise et Jeanine ont même rencontré par hasard celui qui était maire à l’époque, et qui leur a raconté un peu l’histoire et l’ambiance de folie qui régnait à l’époque. Même la garde nationale avait été envoyée sur place pour tenter de faire régner l’ordre ! Aujourd’hui c’est un village très paisible que nous traversons… alors que nous ne devions pas le traverser. Et m… ! Plus de balises dans le village, un coureur revient en sens inverse, je fais ½ tour aussi jusqu’à retrouver une balise. Et là je me rends compte qu’il fallait un peu avant l’entrée du village tourner à droite et prendre le lit de la rivière en contrebas. Des balises se voient très bien dans ce sens, mais pas dans l’autre car dans notre dos pour ainsi dire sur notre droite. Des flèches au sol sont là aussi sur les rochers de la rivière, mais du chemin je ne les ai pas vues, cachées par la différence de hauteur. L’erreur aura été de courte durée cette fois, mais me fait râler à nouveau. Enfin Sougraigne , et je retrouve Jeanine et Françoise. Pointage en 31ème position. Ca aurait pu être pire…

 

 

(à suivre)

 



01/11/2015
3 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 26 autres membres